Comment amorcer une transition vers l’excellence opérationnelle ?
- Claudia Loutfi
- 7 oct.
- 5 min de lecture
Nos organisations collectives portent de grandes ambitions : transformer nos milieux, réduire les inégalités, favoriser l’inclusion et répondre à des besoins urgents. Mais souvent, nous le faisons avec des équipes déjà fatiguées, des ressources limitées et une pression constante pour livrer plus avec moins.
Comme expliqué dans un précédent billet, dans ce contexte, l’excellence opérationnelle devient une condition de résilience, pas un luxe. Elle permet de maximiser notre impact social sans épuiser nos équipes.
Qu’est-ce que l’excellence opérationnelle ?
Pour moi, l’excellence opérationnelle, c’est une approche qui combine efficacité, flexibilité, intégrité et inclusion. On parle souvent de « streamlining » en gestion : réduire au maximum les frictions pour que notre organisation avance plus facilement vers sa mission, un peu comme on conçoit un avion ou un bateau pour qu’il glisse dans son milieu avec le moins de résistance possible.
Ainsi l’excellence opérationnelle touche directement les personnes qui composent nos organisations. Chaque membre de l’équipe apporte une réelle valeur (crée du lien avec la communauté, développe des projets porteurs, innove socialement) et cette valeur peut se perdre si son énergie est accaparée par des tâches administratives ou répétitives qui ne demandent ni sa créativité ni son engagement.
L’enjeu, souvent invisible, c’est que nous risquons de noyer notre potentiel humain sous des frictions inutiles, alors que des ajustements simples (outils adaptés, processus clairs, décisions partagées, etc.) peuvent libérer un espace précieux pour l’impact réel et durable de nos organisations.
Concrètement, cela peut se traduire par :
Un environnement numérique interopérable et adapté.
Des canaux de communication efficaces, limitant la multiplication des réunions.
Des processus de décision fondés sur la confiance et la co-responsabilité.
Des tableaux de bord simples et outils d’aide à la décision, vraiment utiles pour prioriser.
L’automatisation des tâches répétitives, pour libérer du temps humain.
Des outils de gestion de la capacité pour prévenir la surcharge chronique.
Et bien d’autres !
Ainsi, nous devrions avoir pour priorité de construire des organisations fluides, qui maintiennent leur vélocité d’impact sans écraser leurs équipes.
Les défis réels… et pourquoi c’est normal
Le chemin vers l’excellence opérationnelle n’est pas simple. La gestion du changement est souvent le point de friction que beaucoup redoutent, car elle est imprévisible. Quand les urgences s’accumulent (crises RH, pression politique, précarité financière, etc.) l’excellence opérationnelle peut sembler un luxe.
Pourtant, prendre du recul, cartographier les frictions et agir à la source permet souvent de rompre le cycle infernal des urgences et de retrouver du souffle. L’enjeu est de trouver l’équilibre : agir sur les symptômes quand c’est nécessaire, tout en s’attaquant aux causes profondes.
Voici quelques pistes pour avancer vers l’excellence opérationnelle de manière à réduire les risques et défis que peuvent annoncer de tels changements organisationnels :
Développer une planification stratégique co-construite
Je fais partie de celleux qui encouragent vivement la planification stratégique. Sans carte, nous avançons à l’aveugle. On devient très efficaces pour gérer l’urgence et multitasker, mais souvent au prix de notre énergie et de notre créativité.
Une planification stratégique agit comme une carte bien pensée : elle nous permet de canaliser notre énergie vers ce qui compte vraiment, repérer les opportunités et éviter les détours inutiles.
Dans une démarche d’excellence opérationnelle, la planification stratégique aide à identifier où concentrer nos efforts.
Co-construite avec l’équipe (et parfois avec les membres ou partenaires) elle favorise l’adhésion et donne du sens aux choix organisationnels. Chacun comprend le pourquoi et le sens de chaque décision
Les valeurs (environnement, social, gouvernance) comme point de départ
Les valeurs ne sont pas de simples mots à afficher, mais des principes concrets qui guident nos choix et nos pratiques quotidiennes. En les explicitant, c’est-à-dire en montrant comment elles se traduisent dans la réalité, elles offrent un cadre clair pour prendre des décisions cohérentes et renforcent le sentiment d’alignement et de responsabilité partagée au sein de l’équipe.
Réaliser un diagnostic opérationnel
La planification stratégique identifie les enjeux et la direction souhaitée, mais pas toujours pourquoi ces enjeux existent. Le diagnostic opérationnel permet de comprendre les causes profondes en examinant les flux de travail, les rôles, les responsabilités et les circuits de décision. Il aide, entre autres, à repérer les points de friction, clarifier les zones floues et confirmer que tout le monde partage la même compréhension. Ainsi, les solutions mises en place répondent réellement aux enjeux, sans surdesigner les outils ou processus.
Impliquer l’équipe dès le début
Trop souvent, les outils et processus sont imposés d’en haut. En impliquant l’équipe dès le départ, on favorise une gestion du changement plus douce, où chacun se sent acteur plutôt que spectateur.
Appliquer une implémentation progressive basée sur le design thinking
Déployer les changements par phases expérimentales (tests, ajustements), puis pérenniser et étendre les solutions ayant fait leurs preuves.
Comprendre avec empathie : écouter les frustrations et besoins réels de l’équipe.
Définir : identifier les points de friction concrets.
Imaginer : co-créer des solutions simples et adaptées.
Prototyper et tester : Piloter des solutions sur des petites équipes, apprendre par retours, ajuster, puis déployer plus largement.
Gestion du changement, formation et transfert de connaissances
La gestion du changement est souvent imprévisible et redoutée. Avec de bonnes postures et un accompagnement structuré, elle peut être atténuée.
Instaurer des dispositifs d’accompagnement et de formation permet de développer les compétences de l’équipe et de renforcer leur compréhension des enjeux, pendant et après la transformation. C’est une hygiène organisationnelle, pas une action ponctuelle.
Suivi, évaluation et amélioration continue
Mettre en place des indicateurs de performance ne sert pas uniquement à répondre aux attentes du C.A. ou des dirigeant.e.s. Ces suivis sont surtout un moyen de donner confiance dans nos actions, de mobiliser l’équipe autour d’objectifs tangibles et de soutenir la réalisation concrète de nos efforts. En assurant un suivi régulier et en ajustant les stratégies en fonction des retours, on transforme la mesure de performance en outil d’apprentissage collectif et d’aide à la décision, plutôt qu’en simple exercice administratif.
Des critères simples pour évaluer vos solutions
Finalement, l’excellence opérationnelle devrait respecter certains critères permettant sa pérennité :
Simplicité (facile à adopter et à comprendre)
Pertinence (répond à un besoin concret)
Mesurabilité (impact visible, comme le gain de temps, la fluidité)
Adoption réelle (utilisation concrète par l’équipe)
L’excellence opérationnelle n’est pas une finalité parfaite, ni une recette standardisée. C’est une hygiène de travail collective, une manière d’apprendre ensemble à avancer plus fluidement, sans s’épuiser.
Nous faisons tous de notre mieux, avec cœur et conviction. La transition vers des pratiques plus fluides et plus humaines n’est pas une course, mais un chemin. Et sur ce chemin, chaque petit pas compte (et devrait être célébré !) pour nos équipes, pour nos communautés et pour la transformation sociale à laquelle nous aspirons.
