Ce que j’ai appris sur la gestion du changement
- Claudia Loutfi

- 7 oct.
- 3 min de lecture
Avec le temps, j’ai compris que la gestion du changement ne se résume pas à implanter un nouvel outil ou à écrire une procédure. Ce que je retiens surtout, c’est que chaque transformation repose sur un équilibre délicat : faire avancer les besoins de l’organisation sans négliger ceux des personnes qui la pérennise.
Impliquer dès le départ, mais sans épuiser
En pilotant certains projets de transformation interne, j’ai vite réalisé que le cœur du travail ne se joue pas dans les choix techniques, mais dans la façon dont les humains vivent ces changements. On implique les équipes dès le départ, non pas parce que c’est « la bonne pratique », mais parce que sans l'acceptabilité de l'équipe, rien ne tient. Nous avons co-construit les outils, testé des prototypes au sein d'une équipe restreinte, animé un hackathon pour favoriser l’appropriation et soutenu l'équipe à plusieurs niveaux : documentation claire, formations en ligne, accompagnement individuel, etc.
Ce faisant, on observe que la résistance au changement n’est pas un défaut. C’est une information. Derrière chaque résistance, il y a une émotion légitime : la peur de perdre ses repères, la fatigue ou le doute face à la pertinence du projet. Prendre soin de ces réactions, c’est déjà agir sur le changement.
Quand j’arrive dans une organisation, j’essaie d’abord d’écouter. Bien que j’ai en tête une grille des frictions fréquentes (gestion de la capacité, réunions qui prennent du temps, le flou dans les rôles, outils sous-utilisés, difficulté à déléguer ou à retrouver l’information, etc.) je reste souple et curieuse des défis que les individus peuvent vivre. J’observe, je pose des questions : Est-ce un problème d’outil ou de clarté ? Un enjeu de structure ou de confiance ?
Souvent, un symptôme comme « on a trop de rencontres », peut cacher une cause plus profonde...
Ce diagnostic collectif, je le fais à travers des ateliers, des sondages anonymes, mais surtout des discussions franches. Parce que les gens savent où ça coince, ainsi c'est à nous de créer les conditions pour qu’ils puissent l'exprimer.
Ensuite vient le moment de traduire l’analyse en action. Je m’appuie souvent sur les phases naturelles d’adoption : connaissance, persuasion, décision, implantation, confirmation. Ça m’aide à ajuster le rythme et les leviers. Par exemple, je sais qu’avant de convaincre, il faut écouter. Avant de former, il faut comprendre ce qui freine. Avant d’implanter, il faut simplifier.
J’aime travailler par itérations rapides : on essaie une solution, on observe, on ajuste. Ça permet de réduire les risques, d’identifier des leaders naturels et de célébrer les petits succès. Ces « quick wins » on le pouvoir de créer une dynamique d’adhésion bien plus forte que n’importe quelle communication interne du type « merci de lire le processus 8B afin de le mettre en application dans les plus brefs délais ».
Chercher le point d’équilibre entre besoins collectifs et individuels
Un apprentissage clé pour moi, c’est que une transformation ne tient que si chaque personne y trouve un bénéfice concret. Dans un mandat récent, on voulait implanter un plan de travail pour mitiger les risques liés aux absences imprévues (maladie, accident, départ, etc.). Plutôt que d’en faire un outil de gestion exclusivement, on l’a lié à un outil d'aide à la décision pour soutenir les personne à évaluer leur charge individuelle.
Résultat : chaque personne y trouvait un repère utile pour planifier sa semaine, éviter la surcharge et garder du pouvoir sur son temps. L’organisation, de son côté, y gagnait une meilleure vision d’ensemble et moins de risques opérationnels.
Ce type d’approche change la conversation. On passe de « on doit leur imposer cette marche à suivre » à la création d'une alliance entre les objectifs collectifs et les besoins humains. C’est souvent là que le changement devient durable.
Enfin, je garde toujours une pensée pour celles et ceux dont la littératie numérique est plus faible. Ce n’est pas un obstacle, c’est un point de départ. Il est plus simple d'adapter les outils, les rendre intuitifs et reconnaître les différences sans jugement que d'imposer une pratique sans considérer les défis de l'équipe.
Les changements qui durent ne sont pas ceux qu’on impose, mais ceux qu’on ancre dans la réalité quotidienne.
Pour moi, la gestion du changement, c’est avant tout une pratique d’écoute : écouter les résistances comme des signaux, chercher le sens partagé et avancer à un rythme qui respecte la capacité du groupe.
C’est là que les outils cessent d’être des contraintes et deviennent de vrais leviers de mieux-être collectif.


